Une faille interne cause plus de dégâts qu’une attaque externe dans plus de 60 % des incidents de sécurité majeurs. L’accès généralisé au réseau ne repose plus sur la confiance accordée à l’employé ou à la machine, mais sur une validation systématique, même pour les utilisateurs déjà authentifiés.
La multiplication des accès à distance et des services cloud bouleverse les frontières traditionnelles de la sécurité. Les pratiques anciennes, fondées sur la confiance implicite, exposent désormais les organisations à des risques accrus.
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Zero Trust : comprendre une nouvelle approche de la sécurité informatique
Impossible, désormais, de miser sur la confiance par défaut. Le modèle Zero Trust, conçu par John Kindervag alors qu’il œuvrait chez Forrester, tranche net avec les schémas de protection périmétrique d’hier. Désormais, chaque requête d’accès doit être justifiée, quelle que soit l’origine, salarié, serveur, prestataire, ou application externe. L’identité, l’intégrité de la machine et la légitimité de l’action sont systématiquement remises en question.
Derrière ce concept, on retrouve la notion de dépérimétrisation popularisée par le Forum de Jéricho. Autrefois, le réseau d’entreprise se présentait comme une place forte, fermée sur elle-même. Ce temps est révolu : le bureau s’éclate, le cloud s’impose, et la mobilité s’invite partout. La sécurité ne peut plus se cantonner aux murs du siège social ou à un VPN unique.
Le Zero Trust s’appuie sur une logique simple : la vigilance ne s’arrête jamais, peu importe que l’utilisateur soit interne ou externe. La confiance n’est plus un acquis, elle se gagne à chaque instant. Pour y parvenir, plusieurs principes forment le socle de cette approche :
- Vérification continue de l’identité et de la conformité de chaque acteur, humain, machine ou application.
- Accès au moindre privilège, c’est-à-dire une restriction stricte des droits à ce qui est nécessaire, rien de plus.
- Microsegmentation du réseau, pour cloisonner les accès et empêcher la circulation libre en cas d’intrusion.
Au quotidien, cette philosophie se traduit par une gestion méticuleuse des identités, un contrôle d’accès poussé et une surveillance constante. Rien n’est jamais acquis, chaque droit d’accès doit être mérité et renouvelé.
Pourquoi le modèle Zero Trust s’impose face aux menaces actuelles ?
Les cybermenaces s’adaptent, elles aussi. Phishing, ransomware, spoofing ou vol de données frappent tous types de structures, grands groupes, collectivités et entreprises intermédiaires. Les techniques se perfectionnent, surfant sur le télétravail, les terminaux multiples et la généralisation du cloud. Les frontières techniques s’effacent, mais le danger, lui, se renforce.
Le Zero Trust change la donne. Son principe est clair : chaque accès doit être légitime, qu’il provienne du bureau ou du bout du monde. Exit les accès ouverts par héritage ou les privilèges excessifs : chaque demande subit une authentification, une analyse, une traçabilité. Ce dispositif réduit la surface exposée et bloque la progression d’un attaquant, même en cas de brèche initiale.
Avec l’essor des environnements distribués, la montée du shadow IT et l’explosion des usages hybrides, les méthodes classiques ne tiennent plus la route. Le cloud, les applications SaaS et la gestion des données hors des murs de l’entreprise imposent une visibilité et un contrôle sans faille. Les cadres réglementaires tels que le RGPD et les normes ISO 27001 imposent aussi leur rythme : vérification, documentation, traçabilité.
La CISA recommande d’ailleurs une feuille de route claire : authentification forte, microsegmentation, surveillance en continu et chiffrement généralisé. Ces mesures ne relèvent plus de la théorie ; elles s’inscrivent dans une logique de résilience face à l’intensification des cyberattaques et à la pression réglementaire. Adopter le Zero Trust, c’est anticiper les évolutions, protéger les données et garantir la continuité de l’activité.
Principes clés et avantages concrets pour les organisations
L’architecture Zero Trust bouleverse les codes : elle exige un contrôle constant, sans jamais accorder de privilèges sans raison. Plusieurs leviers structurent cette nouvelle sécurité : l’authentification multifacteur (MFA), la gestion des identités et des accès (IAM), la microsegmentation du réseau, et le chiffrement de bout en bout. Chaque utilisateur, terminal ou application doit prouver sa légitimité à chaque instant, que l’on accède à une base stratégique ou à un service SaaS.
Pour mieux cerner les bénéfices, voici les principaux atouts du Zero Trust :
- Accès au moindre privilège : l’accès s’ajuste au strict nécessaire, et les droits sont régulièrement réévalués selon le contexte opérationnel.
- Surveillance continue : l’analyse comportementale en temps réel permet de détecter une anomalie et de réagir immédiatement, avant qu’un incident ne prenne de l’ampleur.
- Microsegmentation : le réseau, fragmenté en sous-ensembles étanches, empêche tout déplacement latéral d’un acteur malveillant.
- Audit et analytique : chaque action, chaque accès laisse une trace, facilitant la détection des signaux faibles et la conformité avec les exigences réglementaires telles que l’ISO 27001 ou le RGPD.
Les solutions de sécurité récentes intègrent ces piliers. Supervision centralisée avec un SIEM, protection des données avec un DLP, gouvernance des accès cloud via un CASB, ou encore détection proactive grâce à l’analytique avancée : chaque brique renforce la posture globale. Mais il ne s’agit plus seulement d’outils : la transformation touche aussi l’organisation. Les équipes IT, sécurité, réseaux et identité doivent désormais coopérer au quotidien. L’enjeu va bien au-delà du périmètre technique : il s’agit de protéger l’ensemble des ressources, utilisateurs, applications, données et environnements cloud, où qu’ils se trouvent.
Mettre en place Zero Trust en entreprise : conseils pratiques et étapes essentielles
L’époque des frontières réseau dessinées au cordeau est révolue : adopter Zero Trust implique de repenser toute la chaîne de sécurité. Ce changement se structure en plusieurs étapes.
Première étape : recenser précisément l’ensemble des utilisateurs, appareils, applications et données à sécuriser. Cette cartographie constitue la base pour définir qui a vraiment besoin d’accéder à quoi, et dans quelles conditions.
Ensuite, le déploiement d’une solution ZTNA (Zero Trust Network Access) marque un tournant. Ce type de solution contrôle minutieusement chaque accès aux ressources, remplaçant peu à peu les VPN classiques. La surveillance s’intensifie, confiée à des outils de SIEM et d’analytique capables de détecter toute anomalie en temps réel. Pour protéger les données, un ZTDP (Zero Trust Data Protection) encadre la circulation, l’utilisation et la sortie des informations sensibles.
Du côté des éditeurs, des acteurs comme Netskope (ZTNA Next, ZTDP, NG SWG) ou Zscaler (Zero Trust Exchange) proposent des plateformes unifiées. Elles assurent la connexion des utilisateurs, terminaux et applications, sans passer par un VPN, tout en garantissant la microsegmentation et une adaptation dynamique des politiques d’accès. La couche SSE (Security Service Edge), composante du SASE, regroupe ces fonctions et s’étend aussi bien sur site qu’en cloud.
La gouvernance reste un point clé : il est indispensable d’impliquer les responsables métiers et la DSI pour ajuster les politiques d’accès au fil des évolutions. L’audit régulier, la formation des collaborateurs et le suivi des indicateurs de sécurité assurent l’efficacité et la cohérence de la démarche Zero Trust.
La sécurité informatique ne se joue plus derrière des remparts. Elle s’invente au quotidien, au rythme changeant des usages, prête à déjouer les attaques les plus sophistiquées. Les règles du jeu ont changé : la confiance ne se donne plus, elle se vérifie.